16 Déc 2011 Tourisme en ligne : ton univers impitoyable…

(Cet article a été publié il y a 12 ans.)

Dans deux décisions, un jugement du tribunal de commerce de Paris du 4 octobre 2011 et un arrêt un peu plus ancien de la cour d’appel de Paris du 23 février 2010, le monde du tourisme en ligne et le droit de la concurrence se sont rencontrés.

Dans l’affaire jugée par le tribunal de commerce de Paris (un appel semble être en cours contre sa décision), deux hôtels et un Syndicat d’hôteliers (le Synhorcat) reprochaient aux sociétés du groupe Expedia (qui exploitent notamment www.tripadvisor.fr ) des manœuvres déloyales.

En résumé, il semble que les hôtels qui refusaient de vendre leurs chambres sur ces sites apparaissaient systématiquement comme complets. Le message implicite était : si vous voulez que le nombre de chambres libres apparaissent, il faut faire affaire avec nous (et nous payer une commission…).

Le syndicat soutenait qu’il s’agissait d’une forme déloyale de commerce qui devait être sanctionnée.

Le tribunal suit totalement le syndicat dans le principe et condamne Expedia à payer des dommages et intérêts d’un montant total de plus de 280.000 € au syndicat et 82.000 € aux deux hôtels.

Le raisonnement juridique suivi par le tribunal présent un intérêt juridique majeur : en utilisant une méthode trompeuse qui constitue une publicité mensongère, les sites du groupe Expédia ont causé un préjudice commercial aux hôtels.

En théorie la réglementation de la publicité mensongère est destinée à protéger le consommateur (et le texte utilisé est d’ailleurs contenu dans le code de la consommation). Donc un texte à l’origine destinée à protéger le consommateur peut servir à moraliser la vie des affaires…

L’autre intérêt de la décision est de nous donner quelques enseignements sur la détermination d’un préjudice en matière de concurrence déloyale puisque si le syndicat obtient plus de 280 000 €, il en réclamait quatre fois plus. Il est particulièrement difficile d’évaluer un préjudice collectif d’une profession, mais on peut raisonnablement soutenir que si le préjudice subi par deux hôtels isolés est de 82 000 €, le préjudice subi par toute la profession (représentée par le syndicat) est nécessairement supérieur à 280 000 €… La modestie de la somme accordée au syndicat est peut-être la trace de la vieille réticence française à ne pas permettre les actions de groupe (les « class actions »).

En tout cas, le monde du tourisme en ligne semble être un monde marqué par des comportements problématiques puisqu’on rappellera que les sociétés du groupe expédia avaient aussi été condamnées par la cour d’appel de Paris qui avait confirmé une décision du conseil de la concurrence parce que certaines pratiques de ce groupe sur le site www.voyages-sncf.com constituent un abus de position dominante.

Dans les deux cas, après le lancement de la procédure, les sociétés mises en cause avaient pris l’engagement de modifier leur comportement. Comme dit le vieux psaume : la sagesse commence avec la crainte de Dieu. En termes un peu moins religieux, on peut aussi dire que la sagesse commence avec la crainte du gendarme de la concurrence, que ce gendarme soit le conseil de la concurrence ou le tribunal de commerce.

du ministre de l’Économie, représenté par le chef du service national des enquêtes de la DGCCRF. Si la décision a connu une certaine publicité liée à la place des opérateurs en cause dans le secteur, c’est moins sur le fond que sur des questions procédurales qu’elle est intéressante.

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Bernard Lamon
Bernard Lamon
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